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En quoi l'écrit en formation peut-il servir différents niveaux d'apprentissage ?


La formation, pas uniquement sur l'objet écrit, mobilise bien souvent l'écriture et peut venir questionner son rapport à l'écrit, ainsi que ses pratiques : « je n'ose pas écrire », « je n'ai pas envie de m'exposer » , « je n'écris plus dans mon métier », « mon chef me dit que je fais plein de fautes »…

L'écrit, au cœur des pratiques professionnelles

À propos de pratiques, professionnelles cette fois, lors d'une formation sur les écrits, les participantes, des auxiliaires de vie ont évoqué leurs difficultés à écrire dans le cahier de liaison pour laisser trace de faits marquants au sujet des personnes qu'elles accompagnent. Ces éléments peuvent se révéler indispensables dans le cas, par exemple, d'une dégradation de l'état de l'usager pouvant nécessiter l'intervention rapide d'un médecin. Mais, elles disaient n'écrire principalement que les gestes qu'elles effectuent pendant une visite à domicile chez la personne âgée, à la fois pour ne pas être prises à défaut, pour justifier de leur activité et pour se mettre à distance de tout écrit pouvant amener des remarques de la part des différents lecteurs (l'usager, la famille, le médecin, l'assistante sociale, un représentant du conseil général …). L'objectif d'écriture de départ, normalement centré sur la personne accompagnée, est ainsi déplacé. Par ailleurs, étant souvent seules dans leur quotidien professionnel, chacune a pu également se rendre compte que selon les structures, la notion d'équipe, la façon dont elles concevaient le cahier de liaison, leurs pratiques pouvaient parfois relever du grand écart. Ainsi on le voit, l'écrit peut avoir des enjeux si forts qu'ils entravent l'écriture. De même, les inscriptions en formation des volontaires désignées d'offices refreineraient un rapport à l'écrit déjà difficile. Comment trouver un intérêt quelconque, voire, cerise sur le gâteau, du plaisir à s'investir dans l'écriture en formation ? Si en plus, l'attente principale est d'avoir une boîte à outils, des recettes miracles, comment accepter que le formateur demande de réfléchir à une question, de la mettre en mots et de la déposer sur le papier ?

L'écrit, vecteur incontournable de l'apprentissage ?

L'écrit se manifeste par le biais des travaux proposés par le formateur : - individuels permettant à chacun de s'exprimer, que ce soit sur le thème de la formation, ou sur un apprentissage : « et si je vous demandais un mot pour caractériser ce que vous avez appris en formation ? » Cette question n'a l'air de rien et pourtant, elle peut parfois susciter un léger haussement de sourcil, ou une exaspération plus franche – je n'ai pas assez travaillé peut-être ? Je dois encore me creuser les méninges ?! Qu'est-ce qu'elle me veut encore celle-là ?-, mais aussi, pourquoi pas, de l'enthousiasme ! Pour moi, formatrice, elle est importante parce qu'elle invite à se poser et à réfléchir sur ce que chacun garde de quelques jours de formation. Mais l’écrit peut être une confrontation de soi avec soi, une manifestation de ses diverses représentations de l’écrit lors de la rédaction d’un mémoire professionnel. Quels enjeux professionnels, personnels y met-on ? Quelle place laisse-t-on à ce mémoire ? Dans ma pratique, j'accompagne des stagiaires dans la rédaction de leur mémoire universitaire. Parfois, ce mémoire est sacralisé, ce qui peut empêcher l'écriture. Parfois les stagiaires, ne sachant pas où ils vont, sont dans une posture vraiment inconfortable. Alors je tâtonne moi aussi, avec eux, je cherche comment faire levier ; je me suis rendu compte que lorsqu'avec la personne, nous arrivons à instaurer un climat de confiance réciproque, le travail s'élabore, et la production s'en trouve facilitée. - collectifs pour interagir avec ses pairs, confronter ses représentations, élaborer des savoirs. Mais parfois, ça ne fonctionne pas : lors d'une formation destinée à des cadres, les sous-groupes ont eu une tâche à réaliser sous la forme d'un écrit. Les personnes d'un des sous-groupes n'ont pu se mettre d'accord et produire. Lorsque nous en avons analysé la cause, il est apparu que les individualités avaient pris le dessus sur l'intérêt collectif. Finalement, l'apprentissage a dépassé la visée de l'exercice puisque les stagiaires se sont saisis de leur difficulté pour la dépasser : nous sommes passés de l'objet écrit au rapport du collectif à l'écrit. Pour ne pas rester sur cette « non-production », le sous-groupe s'est de nouveau coopté à l'occasion d'une autre activité pour tester autre chose. Alors, même pas peur d'écrire ?

Anne Lesueur, formatrice pour Expression


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